Pourquoi François Hollande n’ira pas à Sotchi

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François Hollande n’assistera pas à l’inauguration des JO à Sotchi. Pas plus que les chefs d’États allemand, américain, moldave, polonais, lituanien et estonien. « Trop occupés », disent-ils tous. Mais personne n’est dupe. La raison de ce refus est tout autre, et c’est la vice-présidente de la Commission européenne Viviane Reding qui a dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas : « Je n’irai pas à Sotchi tant que les minorités sexuelles seront légalement discriminées en Russie », peut-on lire sur son compte Twitter.

Comme pour l’appuyer, Barack Obama a inscrit à la délégation qui représentera l’État américain à Sotchi deux lesbiennes militantes, la tenniswoman Billie Jean King et la hockeyeuse Catheline Cahow. Il doit se figurer que leur présence mettra Poutine hors de lui ; alors qu’on peut dès maintenant gager qu’il n’en sera rien et que les deux demoiselles seront reçues au plus haut niveau.

Par ces choix hâtifs et irréfléchis, par ce désir de piquer à tout prix le président russe et de le placer face à sa prétendue « barbarie », les chefs d’État occidentaux démontrent – une fois de plus – leur ignorance totale de la Russie et de sa culture, ainsi qu’une absence criante de volonté ne serait-ce que de tenter de la comprendre. Ces dirigeants pensent, par ce geste, exprimer leur soutien aux homosexuels de Russie ; mais ils oublient qu’il est aussi des gays, en Russie, qui attendent avec impatience les JO de Sotchi et qui supporteront ardemment leur équipe nationale. Bref, ce n’est pas parce qu’ils sont homosexuels, qu’ils cessent d’être Russes. Ce n’est pas parce qu’ils aiment des personnes du même sexe qu’ils deviennent indifférents aux succès de leurs sportifs, qu’ils cessent d’admirer leur travail acharné et leur courage immense, qu’ils perdent tout intérêt pour leurs exploits. J’énonce ce qui semble être une belle évidence – mais apparemment, pas pour tout le monde. Les Occidentaux doivent avoir une représentation bien particulière de l’identité sexuelle d’un être : à les suivre, celle-ci dépasserait toutes les autres. Pour eux, un homosexuel doit, chaque seconde de son existence, vivre très intensément son homosexualité. Il ne peut pas être aussi – et surtout pas d’abord – parent, ami, avocat, écrivain, musicien, russe ou français. Il est homosexuel, un point c’est tout. Et tant pis pour l’homosexuel russe qui éprouve de la tendresse pour sa terre natale, qui adhère à son pays et à ceux qui le peuplent, qui s’identifie avec sa nation et qui voudrait que le pays qui l’a vu naître compte dans le monde – car aux yeux des Occidentaux, celui-là n’a tout simplement pas lieu d’être. Eh bien, si. Je vous le confie en secret, mais de ceux-là, en Russie, on en trouve – et plus que vous ne croyez. Et quand ces homosexuels apprennent que sept chefs d’États ont refusé de participer à cette grande fête du sport que la Russie organise pour le monde, ils ne se sentent pas soutenus. Ils se sentent, au contraire, méprisés.

Car la deuxième spécificité culturelle russe que les chefs d’États occidentaux choisissent de ne pas voir, c’est que la majorité des gays de Russie vivent leur homosexualité différemment de la façon que l’Occident considère comme la seule valable : brandir ses choix sexuels à tous les coins de rue, provoquer et, bien sûr, se poser en permanence en victime et réclamer toujours plus de droits. La plupart des homosexuels, en Russie, considèrent que leurs choix intimes relèvent… de l’intime, du domaine privé : de leurs sentiments, ils puisent des romans qui entrent ensuite au trésor culturel mondial, ils écrivent des poèmes et des chansons poignants qui – sans rien dire – disent tout et même plus. On peut certes reprocher à tous ces « gays » de refuser que leur personnalité soit réduite à une case, de ne pas vouloir lutter pour des « droits » mais de simplement s’assumer, sans imposer leurs choix à personne, sans demander de privilèges. Rester soi plutôt que de se fondre dans une « communauté ». Mais on peut aussi se dire que c’est leur choix, et le respecter.

La société russe estime aujourd’hui, dans son ensemble, que le choix d’un partenaire est « l’affaire privée de chacun » – et qu’on ne peut en faire un objet de lutte collective. Et rien ne sert de répéter aux Russes à longueur de journée qu’ils ont tort là-dessus, de les titiller, comme le fait Obama, de leur manifester du mépris, comme le font tous ces présidents qui n’iront pas à Sotchi. Ces responsables politiques feraient mieux de se dire qu’il est des représentations qui ne changent pas d’un coup de baguette magique mais évoluent, au fil des générations. Et se rappeler qu’en forçant le cours d’un fleuve, on finit par créer un tourbillon. On n’incorpore pas à une culture un élément qui lui est étranger : elle l’expulsera bruyamment, et personne n’en sortira gagnant. Et puis, relativisons un peu : en Russie, à la différence de beaucoup d’autres pays, ce ne sont pas les homosexuels qui sont objet d’une discrimination légale mais la promotion des relations homosexuelles auprès des mineurs. Une loi certes critiquable, mais qu’il faut placer dans son contexte culturel. En l’adoptant et en l’approuvant (et la loi est soutenue par 80% de la population du pays), la société russe place la famille hétérosexuelle avec enfants au-dessus de tout autre type de relations pouvant exister entre adultes – sans les interdire pour autant. De cette façon, les Russes disent au monde que, si l’être humain est libre de choisir la façon de vivre qui lui convient, la société, pour assurer sa survie, doit accorder la priorité à un type de relations précis : parce que, depuis des milliers d’années que l’humanité existe, elle n’a pas inventé de moyen plus performant d’assurer sa reproduction et la transmission de ses acquis culturels et moraux que la famille avec père, mère et enfants.

http://www.lecourrierderussie.com/2014/01/10/francois-hollande-sotchi/

8 Commentaires
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bobforrester
bobforrester
11 janvier 2014 11 h 34 min
pour ma part je souhaite que par rétorsion les chefs d état “amis” s abstiennent d assister à la cérémonie d ouverture des jeux d été voire les boycottent. Les marchands n auront qu à s en prendre aux yankees et à leurs chiens chiens européens!Les athlètes auront l occasion de faire valoir leur travail lors des championnats du monde, c est bien assez gratifiants !
raimanet
11 janvier 2014 11 h 37 min
Sotchi, c’ est trop haut, trop loin, inaccessible aux élus normaux !!!
salimsellami
11 janvier 2014 11 h 55 min
A reblogué ceci sur salimsellami's Blog.
ODIN
ODIN
11 janvier 2014 12 h 32 min
Hollande n’ira pas à Sotchi parce qu’il est occupé à fourailler sa nouvelle maitresse pour rendre jalouse l’ancienne Eh oui, le gros Hollande, malgré son opération de la prostate a encore (?) un peu de ressources.
GOSS
GOSS
11 janvier 2014 13 h 22 min
Et le Qatar, l’Arabie Saoudite… respectent ils le droit des minorités??
Stepan razine
Stepan razine
11 janvier 2014 14 h 55 min
Le droit des homosexuels est un prétexte pour ne pas s’y trouver et l’absence des chefs d’états occidentaux sera limpide quand une opération politico-militaire y sera menée (se souvenir des menaces de Bandar Bin Sultan lors de sa rencontre avec Poutine dans l’été 2013).
cédric
cédric
11 janvier 2014 22 h 34 min
C’est aussi ce à quoi je pensais. Critiqué les choix politique Russe fait envers les homosexuels est peut-être la raison publique donnée pour ne pas se présenter au Jeux Olympique, mais officieusement peut-être les menaces de Bin Sultan sont la vrai raison. Mais nous pauvres mortels, nous ne pouvons que supposer !
bulle12
11 janvier 2014 23 h 17 min
Ce sois disant soutien aux homosexuels de Russie c’est du gros n’importe quoi, c’est juste que politiquement ils ne sont pas très amis