« Les agissements de la Russie mettent en péril la paix en Europe », a déclaré Angela Merkel le 17 novembre dernier à Sidney. Son discours virulent à l’égard de Moscou n’a fait que confirmer ce qui semblait clair depuis déjà un moment : les relations russo-allemandes se sont sensiblement détériorées sous l’effet de la crise ukrainienne, et rien ne laisse augurer, pour l’heure, d’une prochaine amélioration. Le chercheur russe Maxim Sokolov analyse, dans son billet pour la revue Expert, pourquoi la Russie a perdu l’Allemagne.
Certes, voilà déjà un moment que la Russie entretient des relations peu cordiales avec les États-Unis et la Grande-Bretagne, et la crise ukrainienne n’a fait que les détériorer davantage. Il n’y avait là, pour Moscou, rien d’étonnant. Les mauvaises surprises sont venues de là où on les attendait le moins, notamment de Berlin.
On se souvient que les relations de la Russie avec l’Allemagne et d’autres pays d’Europe continentale – exception faite de la Pologne et des pays Baltes – étaient plutôt bonnes, et Moscou était en droit d’espérer qu’ils occuperaient, dans le conflit ukrainien, une position de neutralité. Et ce, pour un certain nombre de raisons : les élites d’Europe continentale n’ont jamais réellement apprécié les expériences américaines sur « l’extension de la démocratie dans le monde », pas plus qu’elles n’approuvaient l’idée d’un nouvel élargissement possible de l’UE (car n’est-ce pas pour intégrer un jour l’UE que l’Ukraine a destitué son président ?). Enfin, l’importance de la Russie en tant que partenaire commercial n’a jamais été remise en question pour l’UE, et, en temps de crise économique, l’Europe n’aurait pas risqué de freiner ses échanges commerciaux avec elle… Du moins, c’est ce qu’on espérait à Moscou.
Ces espoirs étaient partiellement justifiés – un certain nombre de leaders européens ont réagi à la crise ukrainienne précisément comme Moscou le prévoyait : tout en adhérant à la rhétorique belliqueuse de Washington, ils ont mis très peu de zèle à l’appliquer en pratique. En revanche, Moscou s’est trompée dans ses calculs – et gravement – sur l’Allemagne. Berlin a pris dans le conflit ukrainien une position clairement pro-américaine, qui se rapproche même de celle de la Grande-Bretagne, alliée fidèle des États-Unis.
La force de la solidarité atlantiste manifestée par la chancelière Angela Merkel est tellement impressionnante qu’elle a même fait naître plusieurs hypothèses conspirationnistes. Certains ont supposé l’existence d’un pacte, selon lequel la candidature d’un chancelier allemand doit absolument être approuvée par Washington. D’autres se sont rappelés l’affaire de l’or allemand, que Berlin ne parvient toujours pas à récupérer à Fort Knox. On a aussi évoqué la possibilité que Washington possède – et menace de dévoiler – des informations compromettantes sur Merkel, datant de l’époque de la RDA…
On peut supposer ce que l’on voudra, mais force est de reconnaître que Merkel n’est pas la seule, en Allemagne, à s’opposer à Moscou : la chancelière est largement soutenue par les élites politiques de son pays. Certes, les marchands protestent, mais leur voix se fait de moins en moins audible dans la masse de ceux qui approuvent largement la position de Berlin. En Allemagne, on va déjà jusqu’à dire sur la Russie des choses qui, hier encore, auraient été tout bonnement inimaginables. Ainsi a-t-on entendu M. Jauch, animateur d’un talk-show sur ARD, la principale chaîne de télévision allemande, déclarer ceci : « Avec l’URSS, on pouvait au moins espérer que le problème de ses dirigeants se résoudrait un jour de façon purement biologique. Mais Poutine est relativement jeune, dynamique. Il tient encore en selle. Qu’en pensez-vous, combien de temps lui reste-t-il ? »
Malgré tout ce que l’on peut dire de la propagande télévisuelle russe, on imagine mal un Soloviev [célèbre journaliste russe de la télévision d’Etat, ndlr] en train de se demander publiquement dans combien de temps Mme Merkel va rendre l’âme… Mais il est tout aussi difficile d’imaginer que M. Jauch et tous les autres – députés, ministres et professeurs – lancent leurs diatribes à l’égard de la Russie sous une quelconque menace de dévoilement d’informations compromettantes les concernant. Il serait plus sensé de chercher au phénomène une explication non-conspirationniste.
On pourrait par exemple supposer que l’Allemagne vire vers l’atlantisme du fait de sa position dominante incontestable en Union européenne. L’hégémonie allemande est absolue depuis déjà plusieurs années, l’Allemagne dirigeant de main de maître toutes les provinces européennes – si vous avez des doutes là-dessus, demandez aux Grecs ce qu’ils en pensent.
L’élargissement de l’UE vers l’Ukraine aurait pu paraître insensé, s’il ne s’inscrivait pas aussi bien dans la logique de la nouvelle tentative de Drang nach Osten (Marche vers l’Est), que l’Allemagne a entreprise. Un vélo qui s’arrête en marche, tombe. Berlin ne pouvait pas admettre que le vélo de l’UE tombe, car avec lui, c’est son hégémonie toute entière qui pouvait s’écrouler. Dans le même temps, Vladimir Poutine n’avait pas non plus le choix. S’il n’avait pas bloqué le vélo occidental à ses frontières, où celui-ci serait-il allé par la suite ?
Si l’Allemagne avait adopté une position neutre quant à l’affront fait à la Russie en Ukraine, elle aurait reconnu par là que la suprématie politique de la Russie était égale à la sienne. Ce qui aurait inévitablement contraint Berlin à réviser sa Ostpolitik, purement expansionniste au cours des 25 dernières années. Et ce n’est pas un hasard si les Allemands commencent à s’inquiéter du sort de la Serbie, vers laquelle, de leur point de vue, la Russie tend déjà la main. [Lors de son discours à Sidney, Angela Merkel s’est inquiétée du fait que la crise ukrainienne puisse s’étendre à la Géorgie, la Moldavie, la Serbie et les autres pays balkaniques, ndlr]
Pour autant, l’arrière-garde de l’Allemagne n’est pas aussi solide et monolithique qu’il n’y paraît. Les eurosceptiques, représentés par un étrange amalgame entre extrême gauche et extrême droite, sont de plus en plus puissants, en Allemagne y compris. Dans cette situation, céder à la Russie sur la direction Est entraînerait la nécessité de mettre la main à la pâte en politique européenne intérieure. Ce que Berlin, manifestement, ne s’empresse pas de faire.
http://www.lecourrierderussie.com/2014/12/moscou-allemagne-espoirs-brises/
L ‘Amérique fascinante, l’Amérique de la nouvelle civilisation, la statue de la liberté, les chewing-gum, le rock’n roll, les « gratte-ciels », les cow-boys et les indiens, la réussite, la richesse, les héros invincibles, les défenseurs de la veuve et de l’orphelin, les droits de l’homme, les incorruptibles, le modernisme, les belles voitures, la conquête de l’espace, la science-fiction, les jeans, les baskets, le cinéma hollywoodien, tout cela et bien d’autres choses symbolisait l’Amérique de l’après-guerre. On disait à celui qui avait un peu de richesse qu’il avait hérité d’un « oncle d’Amérique ». Tous les regards étaient tournés vers l’Amérique gigantesque, le « rêve » américain.
Tout ce qui provenait d’Amérique ne pouvait qu’être moderne et osé, symbolisant le renouveau, les européens en faisaient même un complexe se croyant toujours en retard de 10 ans et se dépêchant de le rattraper.
Lentement mais sûrement les européens se débarrassaient de leurs vieux oripeaux, partagés entre leur culture profonde désuète et le rêve du nouveau monde. Un monde sans pauvres, un monde généreux dans lequel les riches distribuaient les dollars. Un monde au sommet de l’idéal, de la morale.
Puis les générations ont suivis, le modernisme américain est devenu banal comme si il avait toujours existé. Mais ce n’était plus la conquête de l’ouest mais celle de l’Europe. Les jeux vidéo, la violence, le sang, la loi du plus fort. La finance, « times is money ». Le monde impitoyable, le « tout s ‘achète, tout se vend ». Le tout économique. L’effet de modèle, sur sa lancée, continuait à agir.
Nous ne pouvons que comprendre que ce rêve ait pu atteindre les pays de l’Est après la chute du mur vingt ans après l’Ouest. Les européens se sont mis à rêver de leur fraternité retrouvée entre l’ouest et l’est avec en toile de fond le rêve américain. Réunification de l’Allemagne, Lech Valessa, Soljenitsyne, De Gaulle, Adenauer, enfin une paix retrouvée entre européens pour longtemps.
Mais pendant ce temps un système oligarchique s’est installé. L’Europe colonisée, puis soumise aux intérêts financiers comme étant l’impératif supérieur, puis trahie par un européisme anti-européen, et maintenant se laissant aller à un nouveau partage artificiel de l’Europe, à nouvelle désunion, avec une guerre froide fabriquée de toute pièce, si froide que nous en avons froid dans le dos.
On peut comprendre ce que dit l’auteur Dimitri Sokolov-Mitrich. L’Amérique a perdu la Russie et on peut rajouter qu’elle est en train de perdre l’Europe. Sans la Russie l’Europe est mutilée d’un grande partie d’elle-même.
Mais je pense aussi que l’Europe, en renonçant à elle-même, a laissé l’Amérique sombrée dans la décadence. Elle a laissé l’Amérique se perdre. L’abandon de ses vraies racines européennes lui a permis toutes les dérives.
Allons-nous réagir ? Il est urgent de nous retrouver entre européens de nous tourner vers la Russie qui frustrée de ses racines, libérée du soviétisme, ne voulant pas tomber dans une nouvelle dictature, oligarchique cette fois, nous ouvre la voix pour une vraie renaissance de l’Europe encore une fois mise à mal.
Alors, soit elle reste en place et assume égoïstement le déclin économique du peuple Allemand, soit elle démissionne car n’étant plus capable de représenter le peuple Allemand sur la scène internationale !