Proposé par Foxhound
Ce post complète, le post consacré aux risques sur la dette souveraine. Il tente d’expliquer pourquoi l’immobilier est pour le Trésor tout aussi dangereux que le financement de la dette souveraine. La dette souveraine et les risques sur les actifs des GSE Fannie mae, Freddie mac et Ginnie mae ne faisant au final qu’une seule dette.La fin de la soi-disant reprise est clairement actée. Je renvoie à deux post récents pour prendre une vue d’ensemble de la situation de l’économie américaine :
- L’impasse américaine : Croissance fictive, sortie de crise improbable
- Vers un changement de politique budgétaire aux USA ?
Il n’y a plus aucun doute dans notre esprit : la reprise est belle et bien morte durant l’été 2010. Deux années et demi d’examen patient des données statistiques nous avait conduit à ne pas croire à l’illusion d’une reprise économique aux USA. Au catastrophisme ou à l’optimisme, nous avions préféré l’étude patiente des données. Que la reprise soit le produit artificiel de la dépense budgétaire et financière des USA pouvait se constater PIB trimestriel après PIB trimestriel. Le fait est dorénavant avéré. Le repli budgétaire des trimestres T-1 et T-2 2010 a entraîné une chute du PIB au T-2 2010 (2,4 %) qui pourrait être plus importante s’il apparaît que les importations ont bien été sous-estimées dans le calcul du PIB. La croissance du PIB ne serait plus que de 1,2 % au T-2 2010. La corrélation reprise dépense publique ne peut plus être mise en doute. IL n’y a jamais eu de reprise immanente à l’économie depuis un an.
Le gouvernement des USA pourra faire illusion en augmentant la dépense budgétaire au T-3 2010, le PIB pourrait alors remonter mais ce sera au prix d’un artifice continué et à terme intenable.
La décision récente de la réserve fédérale d’arrêter l’achat des MBS et des Dettes des GSE (Fannie Mae, Freddie Mac et Ginnie Mae) et des agences témoigne d’un changement de cap en cohérence avec la baisse des dépenses budgétaires des T-1 et T-2 2010. L’aveu du FOMC de la FED du 10/08/2010 est de taille : la croissance devrait ralentir et la reprise être plus tardive. Mais la décision de la FED d’acheter des bons du Trésor à maturité longue en lieu et place de RMBS et de la dette des agences manifeste que c’est dorénavant le financement de la dette souveraine qui est devenue prioritaire pour les pouvoirs publics américains (FED+administration).
Les mesures prudentielles de la FED ne doivent pas être sous-estimées. Ces mesures montrent que le FOMC de la FED trahit un changement d’agenda financier des pouvoirs publics américains. La reprise est bel et bien morte et ce sont les conditions du financement de la dette souveraine – (intérêt, souscription) et de son roulement (financement au jour le jour par le jeu des amortissements et des émissions nouvelles de bons du Trésor) qui font problème. Rappelons un chiffre, par le simple jeu des amortissements et des émissions de dettes nouvelles, le Trésor doit trouver chaque mois de 400 à 700 Md de $ pour se refinancer. La certitude de les trouver n’est plus assurée à moyen terme, c’est-à-dire à moins un an.
La mise en perspective par Moody’s d’un risque sur la notation de la dette américaine confirme notre analyse. La corde financière que les USA ont tressé autour de leur cou est de plus en plus solide alors que se dérobe, avec l’échec de la reprise, les bases d’un équilibre précaire : le rétablissement de la croissance en 2009 (T-3 et T4) et 2010 (T-1 et T-2) n’a été qu’une chute différée, la question de la dette devient vertigineuse.
Un lecteur assidu de ce blog aura noté au mois d’août un léger ralentissement des textes mis en lignes. C’est que nous sommes parvenus à une double conviction : d’une part le point culminant de l’offensive contracyclique de l’administration Obama a été atteint en 2009. D’autre part, l’utilisation de moyen contracyclique classique ne peut être qu’un palliatif en cas de dépression. La période de rémission à crédit se termine, la dépression fait retour. Il fallait faire une petite pause pour arriver à cette conviction.
Le corrélat du ralentissement de la progression de la dette et des déficits budgétaires a été le médiocre PIB du T-2 2010. Si un point culminant a été atteint en 2009, alors le repli de la croissance est anticipé au sommet de l’Etat américain depuis belle lurette. De ce strict point de vue la relance est terminée et la déflation pointe son nez si l’on admet avec nous que la croissance a été artificielle. La dépression entravée un moment creusera à nouveau son sillon dans les mois qui viennent.
Mais c’est la décision de la FED de donner la priorité à la sécurisation de la dette souveraine qui fournit les éléments les plus solides à la thèse d’un tournant historique. Nous assistons bien à la mise en place d’un Stalingrad sur le Potomac. En effet en renonçant à financer l’immobilier en août 2010 la FED a pris une mesure complémentaire à la décision, prise en juillet par le Trésor : arrêter d’offrir une prime de 8000 $ aux primo-accédants à la propriété immobilière. Dorénavant, le marché devra soutenir seul l’immobilier.
Or il en est incapable : comme le montre les contre-performances des ventes immobilières neuves tout relâchement du soutien public (FED et Trésor) se traduit immédiatement par des difficultés (baisse des construction neuves). Quant au bilan des coûteux efforts publics pour soutenir l’immobilier, il aboutit à un bilan mitigé : remontée et stabilisation des prix, mais pertes de valeur patrimoniale persistante au regard du maximum des prix atteint au début de 2007.
Nous avons attiré l’attention sur ce que signifiait pour le Trésor le changement de cap d’août. La FED et le Trésor s’accordent sur un point : la dette fédérale est menacée, une mèche longue est allumée qu’il faut éteindre avant qu’elle ne fasse exploser les finances publiques ou qu’elle pose en terme dramatique la question des financements publics de la dette financière et du déficit budgétaire. Mais l’abandon de l’immobilier à lui-même est une mèche allumée tout aussi dangereuse. Elle a l’avantage public d’être plus difficile à percevoir.
Nous avons souvent dit que l’immobilier serait l’épreuve test de la reprise : la reprise dépend de la réussite ou de l’échec de cette politique. L’immobilier c’est aux USA la partie pour le tout, la grenouille de l’évolution des politiques publiques. Le deuil récent de la politique immobilière témoigne que le Trésor et la FED ne croient plus à la reprise et qu’ils ont décidé d’attendre le deuxième choc de la crise : le choc sur les finances publiques. L’abandon de l’immobilier est en lui même porteur d’un choc en retour qui peut être la conséquence d’une crise de la dette souveraine ou la prémisse d’une crise profonde des finances publiques.
Il faut pour démontrer cette thèse revenir sur le financement de l’immobilier depuis le début de la crise. Tel est l’objet de ce post qui examine les liaisons dangereuses entre la dette souveraine et les opérations conduites pour soutenir l’immobilier par la FED et le Trésor.
A – Le financement conjoint de l’immobilier (2008-2010)
1° La crise immobilière privée
La crise immobilière a tari la source privée du financement de l’immobilier. Chargé jusqu’à la gueule de créances hypothécaires résidentielles – tritriséés ou non – les banques et autres institutions de financement des acquisitions de logement (Caisse d’Epargne, Union de crédit, REIT… ) ont subi de plein fouet la crise de l’immobilier dont les constituants sont des prix surévalués, des crédits distribués (Subprime, Alt A) avec imprudence, des capacités de financement des ménages insuffisantes en dépit d’une baisse des taux d’intérêt et d’un allongement de la maturité des prêts hypothécaires. La crise des financements imprudents s’est soldée par de lourdes pertes sur les crédits distribués. La crise des « crédits imprudents » – achevée au premier trimestre 2010 – a été relayée par le contrecoup de la crise économique sur les ménages entraînant la défaillance de très nombreux emprunteurs).
Les banques ont adopté alors une politique de moindres émissions de crédit débouchant sur une contraction du crédit immobilier aggravée par une titrisation privée en chute libre. Les difficultés de l’économie et des politiques de crédit à risque affectaient en fait tous les crédits (crédit à la consommation et crédits aux entreprises) et tous les produits de titrisation (CMBS et CDO). IL est donc apparu dès la fin de 2008 que l’immobilier allait dévisser totalement si rien n’était fait. En 2010, la situation, un peu meilleure pour les banques, ne leur permet toujours pas de faire face au soutien de l’immobilier dans un contexte économique pour le moins incertain.
2° Le partenariat privé-public.
Les politiques mises en œuvre pour pallier la crise du financement privé de l’immobilier ont été doubles. Dès 2009, le Trésor a mis en place la politique de prime aux primo-accédants, il a débloqué des fonds – assez réduits – pour aider au maintien dans les murs des emprunteurs immobiliers en difficulté mais solvables. La FED a offert des garanties sur les pertes financières des grandes GSE (Freddie Mac et Fannie mae) à hauteur de 200 Md de $ dès octobre 2008, garanties portées à 400 Md de $ par l’administration Bush.
La FED a conduit deux actions : a) face à la revente en masse des obligations des GSE en 2009, elle a fait l’acquisition de plusieurs centaines de milliards de $ de RMBS de ces sociétés et de dettes des agences anciennement émises ; b) elle a acheté des RMBS nouvellement émis pour l’essentiel par Ginnie mae et accessoirement par Fannie mae.
Les investisseurs privés ont apporté leur soutien financier au secteur immobilier en achetant des RMBS de Ginnie Mae et de Fannie Mae nouvellement émis car ces derniers étaient et sont toujours placés sous la protection de la FED et du Trésor, la FED trouvant dans le Trésor son financeur en dernier ressort et les GSE disposant d’un garant grâce à lui.
C’est ainsi qu’une base financière restreinte a été restaurée pour favoriser le redressement du marché immobilier. La Réserve fédérale pour encourager les investisseurs privés n’a pas hésité à acheter des émissions nouvelles de RMBS en 2009 et 2010. On ignore en quel(s) volume(s) car la FED ne communique que les données brutes (1325 Md de $) avec une clef de répartition élémentaire : 159,3 md de dettes des agences et 1119,4 Md de $ de RMBS des GSE.
3° Le partenariat du succès à l’échec
Ce partenariat visait à reconstituer de manière artificielle une base financière. Il poursuivait aussi l’objectif de remonter la valeur des patrimoines immobilier en soutenant l’activité immobilière sur le marché du neuf et de l’ancien. L’activité immobilière a repris avec des résultats difficiles à évaluer : le marché de la construction neuve à vivoté, le marché de l’ancien paraît s’être repris sans avoir retrouvé des niveaux de prix élevés. La crise dans l’ancien a été enrayée mais pas vraiment arrêtée. Le bilan est mitigé. La valeur des patrimoines immobiliers a été rehaussée sans atteindre ses niveaux antérieurs (2006-début 2007)
Or la valeur des patrimoines immobiliers pèse lourdement sur le niveau d’épargne monétaire et de consommation des américains. Le redressement des patrimoines en 2009-2010 a évité que l’épargne monétaire ou le remboursement des crédits ne conduisent à une chute de la consommation des ménages-propriétaires (2/3 des ménages) avec les retentissements que l’on peut imaginer sur une économie déjà en contraction. La politique immobilière a donc été un instrument d’une politique générale de relance. D’ou cette question : quelles peuvent être l’impact du retrait de la FED et du Trésor du soutien à l’immobilier à un moment où la dette souveraine des USA est devenue la nouvelle priorité (inavouée) du Trésor et de la FED. On peut poser la question en terme élémentaire : que se passe-t-il si les pouvoirs publics américains se concentrent sur la dette souveraine, quel peut être l’effet indirect de l’abandon d’une politique de soutien à l’immobilier sur la croissance et la dette souveraine ? Cette question est essentielle car le repli budgétaire a eu et continuera d’avoir des effets négatifs sur toutes les autres variables de la croissance (Revenu des personnes, investissement des entreprises, niveau de consommation, chômage…)
B – Les conséquences des décisions de la FED et du Trésor en matière immobilière.
1° Le renoncement à la croissance
La première des conséquences anticipables est un nouveau recul des prix de l’immobilier ancien et de la construction de nouveaux logements. Abstraction faite de l’effet de cette contraction sur la croissance du PIB, c’est à une chute de la consommation et à une remontée de l’épargne qu’il faut s’attendre. Le FED et le Trésor ont omis de préciser que si la dette souveraine devenait une préoccupation première, et l’immobilier une préoccupation seconde, alors le ralentissement allait être provoqué par leur changement de politique de crédit public. L’abandon de l’immobilier aux forces impuissantes du marché en l’état actuel des finances des institutions prêteuses et de la titrisation privée ne peut manquer d’entraîner une rechute économique. Voilà une manière habile d’omettre un constat dérangeant : la reprise est entièrement à crédit et en renonçant au soutien à l’immobilier, la porte a été grande ouverte à un retour de la crise.
2° Les actifs des GSE et les garanties publiques.
Une créance ne vaut que ce que vaut son débiteur garant du remboursement du principal et de l’intérêt, à défaut, c’est le bien lui-même qui devient la contrepartie du Crédit : le logement peut être saisi. Les actifs des GSE détenus par la FED et ou garantis par le Trésor n’échappent pas à ce fait. Or depuis la crise de 2008, les actifs des GSE et des agences américains sont garantis en dernière analyse par la FED et le Trésor. Et en dernier ressort, c’est le Trésor qui garantit la dette des agences et des GSE.
Faisons l’hypothèse que dans les mois qui viennent l’économie américaine fasse une rechute et que les prix immobiliers baissent. Que peut-il arriver ?
1° La perte de crédibilité de la FED – Les contreparties
La FED, disions-nous possède 1119 Md de RMBS des GSE et 159 Md de dette des agences. Les conséquences d’une dégradation de la situation de l’immobilier et de l’économie sont complexes. D’abord la dévalorisation des prix immobiliers ne peut qu’entraîner un écart croissant entre la valeur du principal restant du et de la valeur effective de ses contreparties tangibles : les logements. Les RMBS étant évalués à la valeur du principal restant du par la FED, il est clair qu’il y a un écart entre la valeur des RMBS et des dettes des agences détenus par la FED et la valeur de leur contrepartie qui fondra avec la baisse des prix immobiliers. Il y a un risque de perte de crédibilité du bilan de la FED, bilan déjà fragile et entretenu au prix d’une estimation très optimiste de la valeur des créances possédées.
2° Les types de créances détenues par la FED – flux de principal et intérêt
Ce bilan s’avère extrêmement fragile quand on examine plus en détail les créances des GSE. Pour ce qui est de dettes proprement dites, nous ne savons pas très bien de quoi elles sont faites, de même que nous ne connaissons pas la liste précise des agences concernées. Leur volume relativement réduit n’en fait pas un problème inquiétant.
Il n’en est pas de même pour les RMBS des GSE. Pour les RMBS émis avant 2009, une fraction est douteuse. Ces titres peuvent ne plus générer de flux de principal et/ou d’intérêt. Ce sont des créances mortes inscrites au bilan de la FED. Pour ce qui est de la fraction des RMBS sains, ils comportent le même risque que les RMBS émis en 2009-2010 : se dégrader avec un approfondissement de la crise sous l’action de la montée du nombre des emprunteurs défaillants. La dégradation des flux de principal et d’intérêt sur les RMBS est le second facteur de décrédibilisaton du bilan de la FED
3° La couverture de la FED par les institutions de dépôt.
Pour ce qui est de la couverture comptable des achats de RMBS en 2009, elle a été assurée par une augmentation historique des réserves des institutions de dépôts à la FED. Ces réserves sont à ce jour de 1090 Md de $. Une rechute de l’immobilier aurait pour effet de rendre incontournable le fait suivant : la contrepartie – déjà dégradée – des transferts de fonds des institutions de dépôts se dégraderait un peu plus : baisse des prix des maisons servant de gage aux créances hypothécaires, problème croissant concernant les flux de remboursement et d’intérêt des emprunteurs. La décrédibilisation du bilan de la FED conduirait insensiblement à poser la question de la valeur des contreparties des fonds de réserve transférés à la FED par les institutions de dépôts. Or ces transferts font partie du bilan des banques, unions de crédit et caisse d’épargne qui détiennent l’essentiel des actifs de crédit aux particuliers et aux entreprises et sont les grands opérateurs du marché financier.
4° Crise du cofinancement de l’immobilier.
Le renoncement de la FED à financer sa part de l’immobilier résidentiel via les achats de RMBS nouveaux ne peut que conduire à une double réduction de la base financière des opérations immobilières dans le neuf et dans l’ancien. La FED en faisant défection rompt l’alliance tacite passée avec les investisseurs privés. Il ne peut que s’ensuivre une dégradation de l’immobilier marquée par le rempli de la FED et des acheteurs privés de RMBS : les institutions financières. D’où l’enclenchement par la FED d’un processus de remise de l’immobilier dans les mains du marché dont il ne peut résulter qu’une baisse des prix des logements et des activités de vente et d’achat de biens immobiliers neufs et anciens.
C’est la relance de la crise immobilière dans le cadre d’une reprise économique en échec que les pouvoirs publics savent ne plus pouvoir financer à crédit.
5° Panique sur les fonds des GSE
Dans de telles conditions, le retrait de la FED du marché immobilier ne peut que conduire à un risque de Crash sur les RMBS des GSE. Ce Crash se produira dès lors que les RMBS des GSE apparaîtront extrêmement dangereux dans un contexte de dégradation économique pesant sur les financements de l’immobilier, les emprunteurs ; les garanties publiques auparavant offertes par la FED par le Trésor étant forcloses (FED) ou inefficaces (Trésor). Le processus de Crash obligataire s’est déjà produit en 2008-2009 quand les détenteurs des RMBS des GSE ont voulu s’en débarasser. Ce même processus peut donc se reproduire sur une échelle plus vaste. La FED ne pourra pas faire grand chose, elle a passé la main ; le Trésor se retrouvera en première ligne
C – Le trésor ou le rôle du Trésor – Le sauveteur naufragé.
1° La patate chaude de l’immobilier.
On nous objectera à juste titre que le retrait de la FED ne vaut pas pour le Trésor qui garantit déjà les pertes des GSE à hauteur de 400 Md de $. Et sur ce total, ce sont un peu plus de 100 Md de $ qui ont été engagés à ce jour. Reste donc 300 Md de $ de fonds en réserve.
D’abord notons que ces 300 Md de $ ne sont pas dépensés, il faudrait à nouveau emprunter ou faire des économies sur d’autres postes budgétaires ou de dépenses pour faire face à des incidents sur les obligations des GSE. Et dans ce cas le Trésor, se substituant à la FED, devrait acquérir des titres des GSE dont la FED veut se défaire au rythme de leur amortissement. Or si la FED réalise cette opération, c’est pour soutenir les émissions de titre de dette du Trésor à maturité longue. La patate chaude de l’immobilier peut bien passer de la FED au Trésor, un tel transfert est absurde. Cette absurdité montre que les USA sont à la limite de faire de la cavalerie, c’est l’ultime argument des Etat-faillis avant la banqueroute.
2° Une dette insupportable.
Une nouvelle crise sur les titres de dette des GSE pèserait d’un poids insupportable sur les finances publiques car si une nouvelle crise éclate sur les RMBS, elle aura le défaut d’être générale. Tous les investisseurs voudront se débarrasser de ces obligations dans un contexte de dégradation de l’économie, de la santé financière des emprunteurs, de chômage croissant et de chute des prix de l’immobilier faute de base financière suffisante.
Mais à combien se monte le volume de créances des GSE dont 75 à 80 % est titrisé : environ 6000 Md de $ au T-1 2010 dont pour Ginnie Mae, Freddie mac et Fannie mae majoritairement composé de crédits hypothécaire résidentiels. (http://www.federalreserve.gov/econresdata/releases/mortoutstand/current.htm). Un calcul plus large fait apparaître une dette des agences et GSE de plus de 8000 Md de $. Mais à ce niveau la précision comptable n’a plus vraiment d’importance.
Avec une dette de marché de 13364 Mde de $ (15-08-2010 Tresor : debt to the penny http://www.treasurydirect.gov/NP/NPGateway). Le trésor, déjà inquiet pour le financement de ses bons du Trésor à long terme, se trouve dans la stricte incapacité de faire face à une crise obligataire sur les RMBS des GSE.
3° La mèche longue de l’immobilier
Et pourtant le Trésor garantit explicitement les produits financiers des GSE et leur bilan depuis 2008. Le financement parapublic (GSE-FED-Trésor) de l’immobilier menace les USA d’une crise financière à côté de laquelle la crise, dite improprement, des subprimes est une aimable plaisanterie. Les deux dettes se sont alimentées l’une à l’autre. Les GSE ont pu poursuivre leurs opérations immobilière grâce à l’endettement de la FED s’appuyant sur un secteur financier finançant ces achats de RMBS et fournissant en même temps une partie complémentaire de leurs acheteurs privés. Et l’opération s’est toujours faite à l’ombre du Trésor, garant en dernier ressort. Il est donc normal que la dette revienne au Trésor par le truchement du renoncement de la FED à soutenir l’immobilier. C’est donc le Trésor qui est exposé à un risque financier de 19 500 Md de $ en comptant court et 21 500 Md de $ en comptant large.
La mèche longue de l’immobilier est donc allumée. Elle procède plus discrètement que l’accroissement de la dette financière qu’alimente un train de dépenses publiques démentielles depuis l’automne 2008. Elle n’en constitue pas moins une très sérieuse menace, une menace d’autant plus dangereuse qu’elle s’enracine dans l’économie américaine alors que la dette financière dépend beaucoup plus directement des politiques financières publiques (FED + Trésor). C’est le type même du risque qui agit par derrière, bref qui précipite des crises financières de grande ampleur.
Conclusion.
Le renoncement de la FED à soutenir l’immobilier résidentiel pour se porter acquéreur de bons du Trésor est un tournant de la crise. La question de la dette souveraine ne se pose pas seulement en termes de capacité ou de volonté des investisseurs dans un contexte où le mot ralentissement de la reprise est un euphémisme pour masquer la faillite de la relance et les illusions entretenues par le crédit public. Il y a deux voies qu’une nouvelle crise financière peut suivre pour déstabiliser l’Etat fédéral et sa dette souveraine. L’échec de la reprise posera au Trésor des problèmes dans les mois à venir : souscriptions difficiles, taux d’intérêt à la hausse. Il faudra alors réduire la voilure financière plus sérieusement que cela n’a été fait aujourd’hui. C’est ouvrir la voie à une récession qui pourrait bien prendre la forme d’une dépression. Le Crash lent de l’économie américaine est dorénavant certain. L’effondrement financier est hautement probable. Les USA ne cheminent plus à côte d’un précipice, en changeant de cap, ils sont allés dans sa direction.
Les mécanismes du retour de la crise peuvent suivre la voie immobilière avec un effet paradoxal. Ce risque, moins direct, est plus dangereux. Un Crash obligataire sur les titres des GSE a le potentiel d’ouvrir la voie à une crise des finances fédérales : le trésor se trouvant dépassé par le Crash se trouverait automatiquement entraîné dans la tourmente car il n’est plus possible d’établir une cloison étanche entre la dette des GSE et la dette fédérale. Dans ce cas, le Crash sur les RMBS de 2009 se transformera en crise générale des finances publiques incorporant la dette des GSE. Et c’est bien dans cette direction que vont les USA après que le fusible de la FED ait discrètement disjoncté en août 2010. Le Crash rentré de 2009 ne pouvait être liquidé que dans le cadre d’une reprise endogène véritable stimulant les prix immobiliers. Il continue d’agir à la manière d’un facteur de crise n’ayant pas fait jouer son potentiel de dévastation.
On peut évidemment penser que le Trésor pourrait de nouveau s’accoquiner avec la FED pour faire tourner la planche à billet. D’abord, cette expression n’a plus de sens dans un contexte où l’émission de monnaie au sens strict n’est plus un moyen de financer les Etats. En finançant à plus de 1000 Md de $ la FED, les banques ont sans doute atteint la limite du financement raisonnable de cette institution. Le Trésor ne peut plus leur vendre des titres sans engager les USA dans une politique supposant que la contraction du crédit privé permette d’alimenter en ressource financière le crédit public. C’est ce qui se passe depuis 2008 avec des impacts nuls sur une reprise endogène. La crise peut bien nourrir le crédit public ; mais la dépense publique inefficace ouvre la crise du Crédit public avec ces deux voies.
L’échec avéré de la reprise ouvre donc la voie à la déflation de la production et des actifs tangibles et financiers dont la valeur a été gonflée artificiellement par l’importation d’épargne étrangère et le financement à découvert de l’immobilier. Les phénomènes économiquement aberrants produits par 30 ans de décousu libéral et du tout-marché accompagnée par la servilité des politiques publiques conduisent inévitablement les USA vers une crise économique et financière plus profonde. La déflation générale est virtuellement là
Nous en avons maintenant l’intime conviction : c’est le scénario noir qui est en train de prendre le pas sur les vaines espérances de la reprise. La course contre la montre entre reprise et croissance de la dette a été perdue en 2010 après que le déficit budgétaire ait été discrètement revu à la baisse au T-1 et T-2 2010. Le pari de l’administration Obama de faire de la croissance en utilisant un Keynésianisme débridé a fait long feu : 12 mois, la croissance vertigineuse de la dette n’aura guère duré plus longtemps : 16 Mois. La croissance aura fait illusion durant 9 Mois (T-3 2009 à T-1 2010). Quel Bilan !!!
Faute de politique alternative l’administration américaine se retrouve au milieu du gué sans pouvoir aller de l’avant ou de l’arrière. Elle va être emportée par le flot de la dette et/ou de la déflation. Il restera alors que la banqueroute ou l’hyperinflation. Dans les deux cas, l’intermède du nouvel ordre mondial se terminera. D’ailleurs, ce nouvel ordre ressemblant à l’ancien en pire, n’avait pas d’avenir. En perdant le frêre-ennemi soviétique, les USA ont perdu un partenaire indispensable à la régulation de leurs actions intérieures et extérieures.
Le résultat ne s’est pas fait attendre : 21 ans après l’effondrement du mur de Berlin et 19 ans après l’effondrement de l’URSS, les USA sont menacés par un même processus de décomposition de leur contrôle impérial du monde. La puissance unipolaire est en train de disparaître avec les coups qu’elle a porté à son système économique –depuis les années 80 – à l’ordre financier dont elle est encore le centre –depuis le milieu des années 90) et les inégalités croissantes dont elle a conjuré 30 ans d’effet politique négatif en gonflant artificiellement la valeur des patrimoines immobiliers. La crise immobilière qui menace de faire basculer le Trésor dans une crise fondamentale est la juste revanche de la dégradation longue de l’économie et des rapports sociaux de production voulue par des élites globalitaires, élites incapables de penser les effets déstructurant d’une globalisation irréfléchie dont ils tiraient richesse et gratification.
Cette oligarchie aveugle, cupide et incompétente a sur les couches de la Nomenklatura soviétique en fin de course deux désavantages : elle poursuit ses propres intérêts sans paraître avoir compris la crise, elle ne paraît pas douter des modes de fonctionnement dont elle tire prestige, pouvoir, puissance et richesse. Et surtout, elle dispose de la plus gigantesque accumulation de système d’arme en temps de paix 8000 $ de $ constant ont été dépensés depuis 1995 (BEA Table 3.9.6. Real Government Consumption Expenditures and Gross Investment, Chained Dollars 2005). Dans les périodes de transformation, la conservation des avantages de la puissance et le monopole des armes ne font pas bon ménage quand les changements s’imposent à une puissance qui voit son avenir lui glisser des mains.
Onubre Einz
http://reseauinternational.heberg-forum.fr/ftopic103_econmie-us-sous-assistance-respiratoire-attendant.html