BLAGUE : Pour le Gouvernement Français ” le sujet est clos”, _ pour les médias algériens le sujet reste ouvert !

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Tribune libre de Djerrad Amar

Algeria's FM Lamamra speaks during a news conference in AlgiersTel qu’il a été traité par le Gouvernement le sujet qu’il considère clos apparait plutôt comme une dérobade. Ce que nous aurions été en droit d’attendre c’est que le Président de la République interprète lui-même ses propres propos et qu’il nous dise  en toute transparence à qui s’adressait exactement ses propos, à l’Algérie ? à Manuel Valls ? ; et à quoi il faisait  exactement allusion, faute de l’avoir fait il a  laissé le champs libre aux médias de donner  libre cours à diverses interprétations en rapportant notamment des  rumeurs de coulisses  provenant de différentes sources  propageant  différentes versions pour le moins  différentes et souvent fantaisistes. La transparence que l’on nous promet toujours n’y trouve pas son compte.
Si nous voulions rester en surface, nous nous contenterions  de ce que nous lisons dans les médias  à savoir que Dimanche  le  ministre algérien des Affaires étrangères  Ramtane Lamamra a pris connaissance “avec satisfaction” du communiqué du président François Hollande qui a exprimé ses sincères regrets pour l’interprétation qui a été faite de ses propos sur l’Algérie, d’après ce que son  son porte-parole à l’agence de presse APS.

Nous pouvons lire   notamment ” … le chef de la diplomatie algérienne Ramtane Lamamra a “pris connaissance avec satisfaction du communiqué rendu public par M. Hollande, en particulier les sentiments d’amitié qu’il porte à l’Algérie et le grand respect qu’il a pour son peuple“, a déclaré son porte-parole, Amar Belani, en ajoutant  que “l’état et les perspectives du partenariat d’exception entre l’Algérie et la France” seraient “l’objet d’échanges à l’occasion de la communication téléphonique que le président de la République Abdelaziz Bouteflika recevra de son homologue français”.

Et hier Lundi on lisait ” Le président français François Hollande a téléphoné lundi à son homologue algérien Abdelaziz Bouteflika,  selon  une source officielle citée par l’agence de presse APS sans préciser la teneur de l’entretien.


Par ailleurs toujours hier Lundi la porte parole du Gouvernement lors de son point de presse à l’issue du Conseil des Ministres, interrogée  par un journaliste sur les propos de François Hollande a répondu notamment  que l’incident était clos en parlant de malentendus. . La vidéo du point de presse publié sur le site officiel Présidence de la République comporte bien une partie de sa réponse, mais un extrait vidéo publié sur Dailymotion comporte la réponse complète qu’il convient de retenir  :

Boutade sur l’Algérie: «le sujet est clos» pour… par 20Minutes
En nous aidant de la vidéo figurant sur le site de la Présidence de la République et de l’extrait  cité ci-dessus, nous avons reconstitué l’échange complet :

Question du journaliste : Une partie du Weekend a été occupée par une polémique à propos de l’Algérie, comment qualifieriez-vous les propos du Président, est-il dans son rôle lorsqu’il fait de l’humour à propos d’un partenaire à l’étranger ?
Réponse de la porte-parole : D’abord le sujet est clos , je crois vraiment que tout a été dit sur ce sujet, comment est-ce que je qualifierai les propos du Président ?  …, c’est un propos dont a pu constater  qu’il laissait place à des malentendus,  et donc le Président de la République  a tenu à lever ces malentendus, point ! *Ce qui pose un problème dans l’absolu c’est que ces propos sont sortis de leur contexte  pour être instrumentalisés . Je crois que c’est ce qui s’est passé cette fois-ci  et à priori au moment où nous avons constaté qu’une clarification  s’imposait nous l’avons faite  cette clarification et moi je ne peux que regretter à contrario qu’en particulier le responsable de l’UPM joue ce petit jeu de l’instrumentalisation des propos, je crois vraiment  que l’intérêt national est quelque chose de suffisamment important pour éviter de jouer à ce jeu-là. Voilà.
fin de l’extrait 
note : *la partie en caractères gras   ci-dessus ne figure pas  dans la vidéo figurant sur le site officiel.
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suite de notre éditorial :
 Donc si  nous nous  en  tenions aux communiqués et déclarations du  Gouvernement Français on pourrait s’en tenir là  il s’agit d’interprétation, de malentendus,  et ” l’incident est clos”, mais il se trouve que nous lisons aussi la presse algérienne et que pour les médias Algériens l’incident est loin d’être clos ,  il reste ouvert, et les tous derniers articles sont d’une tonalité cette fois beaucoup plus politique et analytique que  ceux que nous avions pu lire la semaine passé qui faisait surtout part de l’indignation des personnalités algériennes et de la demande d’excuses des médias,   et pour vous permettre de mesurer la tournure politique que les médias font ressortir, nous ne pouvons mieux faire que de reproduire ci-dessous in extenso quelques articles que nous avons sélectionnés et qui prouvent bien que les médias algériens ne se sont pas laissés berner par la manœuvre qui consistait à faire croire à un interprétation ou à des malentendus.
Pour ma part je considère que les journaliste algériens traitent le sujet avec sérieux et avec une liberté d’expression qui les honorent, on ne peut en dire autant des articles des certains médias français qui le plus souvent se projettent dans l’ironie ou la dérision avec des extrapolations où des suppositions à côté de la plaque, et souvent même avec des connotations parfois humoristiques.
Voici les articles algériens :
La blague Hollande et la facture de Val-de-Grâce

 

par Kamel Daoud
Bien sûr, c’est le jour des réactions. Après la blague du Président français sur le pays, plusieurs conclusions s’imposent.
D’abord, il semble que la France soit passée du Président canaille au Président idiot. Ce pays slalome désormais entre l’idiotie et le cas du voyou. Au contraire de l’Algérie où on a un président malade et un régime en bonne santé, la France (politique) est un pays malade avec un Président bien portant, rond et souriant.
Ensuite, il y a le naturel : on le chasse et c’est Hollande qui revient au galop. Il exprime, malgré lui, le fond de la vision qu’a la France politique sur une ancienne colonie : malveillante, mauvaise et primaire. Il y a la France et il y a la barbarie. Dans la barbarie on va prendre les figues et l’argent, mais c’est au CRIF qu’on se détend entre amis.
Ensuite, il y a la réaction algérienne. Le réalisme, le pragmatisme, l’enjeu des contrats, la proximité et les capitaux, empêchent que l’on réponde à la blague par la sévérité. Le réel impose sa mesure et oblige de baisser le drapeau et le pantalon. L’Algérie est faible et dépend encore plus de la France après l’indépendance qu’avant. Le pragmatisme est une loi et l’hymne n’est qu’un poème. La réaction officielle, si une nuit a été vigoureuse, elle a opté pour la pondération le lendemain de la cellule de crise. C’est selon les moyens. Selon Georges Washington, un sac vide ne tient pas debout ; un sac à moitié vide tient à moitié debout donc. On a beau s’indigner de Lamamra, il n’est que l’expression du bras sans os qui nous gouverne.

 

De notre économie faible, de notre idéologie de fatwas, de nos manques de compétences, de nos errances. A pays faible, réaction molle.

Ensuite ? Ensuite que peut (variation sur un proverbe connu) le malade entre les mains du laveur de cadavres ? Par son choix de se faire hospitaliser en France, l’actuel président nous a affaiblis, a transformé le coup d’éventail en cou de mouton tendu. On dépend d’un homme qui dépend d’un dossier médical qui dépend de la France.
Aujourd’hui que l’on se fait insulter, on ne peut officiellement que grimacer. L’épisode Val-de-Grâce est notre défaite qui va durer et notre talon d’Achille. Le Français Hollande peut aujourd’hui se permettre la plaisanterie qui était impossible avec Chadli qui s’est fait hospitaliser en Belgique, ou avec Zeroual malade en Suisse ou Boumediene en URSS. On paye un choix. Et à la fin ? Cela fait mal mais c’est aussi l’expression du piège de l’hyper nationalisme de propagande. On a gonflé ce peuple à l’hélium quand il s’agit du Maroc, comme disent les internautes, ou pour attaquer des opposants internes traités de harkis ; aujourd’hui, l’émotion veut la même dose de bravade. A assumer donc ce peuple que l’on a nourri à la bataille d’Alger sans fin. Après la balle de novembre, le plouf de décembre. C’est ainsi. Avant de demander à Lamamra de dire mieux, il faut un pays qui fait mieux et un président en bonne santé.
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Merci pour la compote !

Par Meriem Sassi – Les Français ont-ils réellement l’intention de considérer un jour l’Algérie autrement que comme un immense marché sur le pas de l’Europe ? La réponse aurait pu être optimiste, il y a encore quelques heures, lorsque tous les projecteurs étaient braqués sur la grande messe économique organisée à Alger à grand renfort de propagande et d’effets d’annonces, en faveur de la «ferme volonté» de la France d’investir en Algérie. Depuis le départ d’Ayrault, de ses ministres et de la centaine de patrons qui l’accompagnaient, après une virée sous le soleil d’Alger, le doute n’est malheureusement plus permis. Le constat est sans appel et ne souffre aucun doute. En guise de contrats productifs et de transfert technologique, le Medef, l’organisation patronale française, n’a laissé sur la table soigneusement préparée à Alger en son honneur qu’une poignée de protocoles insignifiants sans aucune échéance précise, pour la fabrication de… compotes et de joints de chaussée. Dans le discours politique, pourtant, la barre a été mise très haut et la réunion du Comité intergouvernemental de haut niveau activement préparée, en vue d’un partenariat économique «gagnant-gagnant» devant être amorcé par la signature de contrats importants. Un matraquage médiatique a été savamment orchestré – à Alger plus qu’à Paris, d’ailleurs –, sans vraiment masquer la réalité. Les amabilités et les mondanités protocolaires ont peut-être décrispé les relations politiques et occulté pour un temps les exigences mémorielles, mais elles n’auront absolument rien apporté sur le plan économique. Un maigre bilan qui ne manquera pas de profiter à d’autres partenaires autrement plus engagés aux côtés de l’Algérie. La percée de la Chine en est le meilleur exemple.
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par Lucienne magalie pons
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Diablo
26 décembre 2013 16 h 19 min
Intéressant. Il y a sans doute trop d’attentes de part et d’autre et ça complique tout.
J’ai l’impression qu’on est en train d’assister au même scénario que celui qui a prévalu entre la Belgique et le Congo: une lente érosion des relations qui ne laissera que regrets et amertume.